Médecine intégrative : médecine du futur ?
Il existe actuellement, à l’échelle planétaire, un courant qui se développe rapidement en faveur de la médecine dite intégrative. Initié aux USA, il présente comme intégratif le recours à diverses conceptions et moyens de traitements dits alternatifs, ou complémentaires, prescrits simultanément et en parallèle aux méthodes officielles d’approche et de traitement des patients.
La médecine intégrative est née, dans les années 90, d’un groupe de médecins qui ont souhaité ne pas suivre le mouvement médical de cette fin du vingtième siècle, conscients qu’il nous menait dans une impasse. Aux Etats-Unis, le Duke Center for Integrative Medecine https://www.dukeintegrativemedicine.org, les cliniques du stress de Jon Kabat-Zin ont été les pionniers de cette approche.
En Europe, on peut citer comme précurseurs le centre ressource d’Aix-en-Provence http://www.association-ressource.org, le docteur David Servan-Schreiber, le magazine Santé intégrative http://www.santeintegrative.com, le docteur Thierry Janssen, le Bristol Health Cancer. On trouve encore aujourd’hui, d’un côté une médecine se disant scientifique, s’affirmant basée sur la preuve, faisant la promotion de protocoles et ne vénérant comme seul Dieu de la recherche que les études en double aveugle et de l’autre de multiples approches complémentaires ou alternatives ancestrales ou modernes.
La notion d’intégration en médecine ne peut reposer que sur une conception éclairée du fonctionnement physiologique du vivant qui explique en quoi et de quelle manière les divers systèmes qui constituent le corps humain sont reliés et coordonnés entre eux pour permettre le maintien de la vie, et comment il gère ses relations avec son environnement, de quelque nature que soit ce dernier.
La population, notre monde et les maladies évoluent. Aujourd’hui les maladies chroniques l’emportent sur les maladies aiguës. Elles sont la première cause de mortalité (60%) et représentent près de la moitié des consultations médicales. A travers les handicaps qu’elles entrainent et l’inaptitude de notre système à les prendre en charge, elles deviennent un problème socio-économique majeur. En raison de la diminution des maladies aiguës et du vieillissement de la population elles prévalent de plus en plus. Le système médical actuel est mal adapté pour soigner les affections chroniques. Les consultations sont de plus en plus courtes et les protocoles de plus en plus standardisés. Les médicaments sont le plus souvent des « anti » ou des bloqueurs de la physiologie. Alors que les maladies chroniques nécessitent de redonner une physiologie opérationnelle au corps et à l’esprit pour les remettre dans une dynamique de vie. Ceci nécessite des consultations longues, une approche multidimensionnelle et individualisée et une prise en charge globale du terrain.
Il y a plus de 40 instituts universitaires de médecine intégrative en Amérique du Nord, y compris Harvard Medical School. Toutefois, ce modèle n’a pas connu la même expansion en Europe. En effet, il existe de nombreux thérapeutes de médecines complémentaires mais très peu de centres offrent une collaboration active pluridisciplinaire entre ces thérapeutes naturels et les médecins conventionnels.
La médecine conventionnelle s’est développée principalement autour du traitement des affections aiguës. La chirurgie, les médicaments, la spécialisation permettent aujourd’hui une approche protocolaire, souvent efficace pour traiter ces maladies. Mais l’utilisation des médicaments au long cours démontre de plus en plus leurs limites pour les affections chroniques. Les médicaments luttent contre des réactions chimiques souvent physiologiques et n’ont aucune capacité à s’adapter à une physiologie humaine en constant mouvement. On ne peut pas non plus envisager d’opérer en permanence. Il faut donc faire évoluer notre modèle de soin sans détruire le précédent.
L’analyse des données épidémiologiques montre aussi la nécessité d’une évolution de la médecine :
- Croissance de la prévalence des patients souffrant de maladies chroniques.
- Vieillissement de la population.
- Système de santé hyper spécialisé : les patients chroniques ont besoin d’une approche holistique et multidisciplinaire que les spécialistes ne peuvent offrir.
- Demande des thérapies complémentaires a augmenté de 120 % de 2002 à 2012.
La méthode intégrative repose sur l’idée que les maladies chroniques se produisent en raison d’un changement dans l’équilibre physiologique, biologique et psycho-émotionnel du patient.
La prise en charge des patients nécessite des consultations médicales conventionnelles et des consultations de médecines complémentaires. Ces différentes approches permettent une évaluation des états nutritionnel, neuropsychologique, immunitaire, micronutritionnel et génétique.
Le projet thérapeutique ou préventif est ensuite réfléchi entre les thérapeutes et avec le patient.
Les outils thérapeutiques seront choisis parmi les médecines conventionnelles et complémentaires.
On peut donc trouver conseils nutritionnels et compléments alimentaires, psychothérapies, méditation, coaching de vie, ostéopathie/chiropraxie, soins énergétiques, yoga thérapie, musicothérapie, Qi gong, Pilates, physiothérapie/kinésithérapie, oxygénothérapie, sauna, acupuncture, auriculothérapie, phytothérapie, homéopathie, avec ou sans médicaments…
Il est tout à fait naturel que certains hommes en quête de sens aient fait émerger une nouvelle pratique et un nouveau concept : la médecine intégrative. Celle-ci cherche à donner une juste place à de multiples outils et courants thérapeutiques dans le respect de leurs particularités et dans la prise en considération de quelques notions fortes de la fin du vingtième-siècle :
- Le réseau :
la mise en relation de la médecine conventionnelle avec les médecines complémentaires et les psychothérapies permet de créer une nouvelle force de soin au service du patient. Le réseau c’est aussi celui formé par la famille, la société, les thérapeutes dans lequel chaque individu doit avoir sa place. - L’unicité :
les êtres humains sont différents les uns des autres, ils sont donc tous uniques. D’où l’importance des différentes méthodes thérapeutiques et de la relation thérapeutique, seule capable de reconnaître cette unicité. - La globalité et la multidimensionalité :
les différentes fonctions et organes qui composent et caractérisent le corps humain sont indissociables. Ceci s’applique donc particulièrement au corps et à l’esprit. D’où la nécessité de la prise en compte de la dimension psychologique d’une maladie et l’importance des différentes psychothérapies ou méthodes de développement personnel (relaxations, yoga, méditations, etc.). Cette globalité s’applique aussi au monde et à la société, les liens que nous entretenons avec notre environnement sont tout aussi déterminants pour l’état de santé. - Les preuves scientifiques :
les évidences scientifiques existent tant au niveau de cas individuels, parfois difficiles à reproduire, qu’au niveau des grands groupes de personnes. Il est important de diversifier les modes de validation en les adaptant à chaque thérapie. La méthodologie pour démontrer l’efficacité des médicaments est différente de celle que l’on applique pour valider des thérapies complémentaires, il n’en demeure pas moins que la validation pour sortir de la croyance est importante. - La systémique :
chaque être humain est un système complexe dont l’analyse passe par une approche systémique. Les méthodes remplacent les protocoles. Le pouvoir d’auto-organisation d’un système pour maintenir sa stabilité dans le temps et dans son environnement est extrêmement puissant. L’étendue de notre ignorance n’est pas un frein, mais une certitude qui n’empêche pas l’intervention. L’observateur devient un acteur. L’évaluation ne peut être dissociée de l’intervention.
Tout ceci entraîne une forme de sagesse nécessaire à tout thérapeute intégratif, particulièrement le médecin, avec cette nécessité de renouer avec l’essence de la philosophie : la recherche de la sagesse.
Une nouvelle aire s’ouvre à nous, celle de l’individualisation des soins par la pluridisciplinarité et la complémentarité des approches thérapeutiques. Celles-ci, dans leur synergie, permettrons une efficacité décuplée et une « responsabilisation » des patients devenant, ainsi, acteur de leur propre guérison.
Cette ouverture globale des esprits doit nous permettre de mettre en oeuvre, une nouvelle vision de la médecine, une médecine holistique appréhendant l’être humain dans sa globalité physiologique, psychologique et émotionnel.
Rappelons-nous de la définition de la médecine (petit Larousse) :
'Ensemble des connaissances scientifiques et des moyens de tous ordres mis en œuvre pour la prévention, la guérison ou le soulagement des maladies, blessures ou infirmités.'
A ce titre, devons nous considérer cette médecine intégrative comme une vision moderne de la médecine ou un retour à ses propres principes fondateurs? Peut importe après tout, ce qui doit dorénavant primer sur toutes les considérations personnelles et orgueilleuses, au delà de toutes les « batailles de chapelles » , c’est… l’efficacité!
Bien évidemment, les efforts seront à fournir par tous et pour tous, du Médecin à l’Ostéopathe, du Sophrologue au Phytothérapeute, du Naturopathe à l’Homéopathe , et de toutes les disciplines précédemment citées dont les bienfaits ne souffrent d’aucunes réserves.
Inspirons nous de nos amis Nord- Américains et Helvètes !
Enfin, on ne le répétera jamais assez, la prévention doit être le socle de notre santé, de nombreuses pathologies directement responsables chaque année de millions de décès ou de troubles fonctionnels pourraient être évitées ou atténuées en mettant en application quelques règles d’hygiène de vie très simples. C’est par exemple le cas de nombreuses pathologies cardiovasculaires, du diabète (2), des maladies auto-immunes….de ce qu’on appelle, de manière générale, les maladies de civilisation qui représentent aujourd’hui une des principales causes de mortalité dans le monde.
Pour aller plus loin avec :
DIU_Pratiques_psychocorporelles_et_Sante_integrative
Coll_ge_universitaire_interdisciplinaire_de_medecine_integrative_de_Paris